Friday, October 06, 2006

Nos Grands Dictateurs

En juin dernier, j'ai eu une discussion intéressante sur le personnage qu'est Nicolas Sarkozy en France. Mon ami affirmait sans scrupules qu'il incarnait le retour du fascisme en Europe et que les "excentricités" des dernières années ne deviendraient que pire.
Je n'étais pas d'accord. Je trouvais que le terme fasciste était un peu fort en dépit du caractère intransigeant des politiques de Sarkozy car c'est un terme qui doit être utilisée avec précaution. Je croyais que les gens étaient assez conscient de leur histoire pour ne pas répéter les erreurs des années 20 et 30 en permettant des fascistes de prendre le pouvoir, subtilement ou non. Mais j'admet sans gêne m'être trompé sur le sujet.
La fin de la Guerre Froide a provoqué la crise de la fin des idéologies que certains appellent la fin de l'Histoire. La troisième voie de Giddens et personifiée par Blair devait constituer le compromis entre le libéralisme de droite et les politiques sociales. À la place, cela a concrétisé l'ère de la gestion. En effet, il est difficile d'affirmer que la politique des pays occidentaux depuis seize ans est axé idéologiquement. Objectif des "déficit zéro", équilibre budgétaire, gestion de crises, la politique ne semble plus un lieu de débats d'idées mais plutôt un centre administratif plus réactif que proactif.
Ainsi, un mode gestionnaire cherche à limiter sérieusement les dangers ou risques ainsi qu'à limiter les dégats en situation de crise. Un état gestionnaire est pratiquement une incarnation du Lévithan hobbsien, quelques touches de modernité en plus. L'idée de gestion n'est-elle pas avant tout de protéger les acquis et potentiellement les faire fructifier? D'être focalisée sur la sécurité? C'est ce qu'Ulrich Beck appelle la "société du risque".
Dans ce contexte, nous sommes plusieurs à penser que d'analyser la politique et le comportement de ses acteurs en termes de Gauche et de Droite est caduque. À l'époque de la gestion, il ne faut pas parler d'idées ou même de valeurs - quoique la question des valeurs demeure tout de même discutable - mais plutôt de priorités et si la perspective de celles-ci fait preuve d'inclusivité ou d'étanchéité (conservatisme).
Non ceci n'est pas un texte portant sur Sarko. Il ne fait qu'incarner en France un triste courant occidental qui, plus particulièrement depuis cinq ans, siphonne tel un vampire l'insécurité des gens (réelle, imaginée ou imposée) pour s'approprier et asseoir son pouvoir. Un horrible courant si palpable dans les années d'avant-guerre.
Mais non, on ne peut demander à notre génération ou celle de nos parents de se souvenir de cette période. Et Oui, l'Histoire est toujours écrites par les vainqueurs mais il n'en demeure pas moins que l'Histoire n'est pas uniquement la guerre et il faut s'inspirer de ces périodes de "paix" pour mieux comprendre les mécanismes de notre temps. C'est impératif de le faire.
Je regarde autour de moi et je m'informe sur ce qui se passe ailleurs et mon admiration pour George Orwell ne fait que devenir plus grande. En France, Ségolène Royal (la "gauchiste") et Sarkozy ont commencé leur surenchère ridicule sur ce qui doit être fait avec les jeunes des banlieues (les envoyer à l'armée et utiliser des troupes pour protéger en permanence ces quartiers) ou les étudiants non-performants (évaluation de leur efficacité et importance effectuée à la fin du PREMIER trimestre). En Grande-Bretagne, le gouvernement Blair vote des lois autoritaires à un degré assommant (le Anti-Social Behavior Act permet à quiconque de dénoncer qui il veut pour ce qu'il veut (p.e. musique forte) et ce "criminel" est fiché, averti et s'il y a une seconde plainte, l'individu est arrêté et emprisonné!). On peut ajouter à ca les déclarations de John Reid (Intérieur) et Jack Straw (liaisons parlementaires) sur le comportement que les musulmans doivent adopter, entre autres de ne pas porter le voile parce que cela les identifies comme Musulmans!
En Allemagne, le NPD (Nationaldemokratishe Partei Deutschlands - NAZI) fait des percées partout au pays et voit sa popularité s'accroître avec régularité. Avec les mêmes discours nazi axé sur la haine et la colère, mais le turc à la place du juif. Ajoutons à ça les "Murs de Berlin" 2 et 3 en Israël et maintenant à la frontière américano-mexicaine (pour protéger la population respectable contre les méchants étrangers voleurs de jobs) et vous avez, en acier et béton armé, ce que l'Occident a démonisé - avec raison - pendant 30 ans. Je pourrais continuer la liste des pays occidentaux qui valorisent les "Droits et la Liberté" en faisant le contraire mais j'en aurais pour des semaines.
Le conservatisme intransigeant, démesuré et opprimant a maintenant toute la place dans nos institutions politiques. Et nom de quoi: de notre SÉCURITÉ. Mais vous sentez-vous menacé? En constant danger d'être mutilé ou assassiné? Prenez-vous le train ou le métro en vous disant "C'est peut-être la dernière fois?". Non, je ne crois pas, pas plus que les londoniens, les français ou les allemands. Alors pourquoi tolérer le comportement de nos élites politiques? Sommes-nous devenus à ce point passif pour être sensible à l'évidence? J'espère que non.
Je crois toujours que définir la politique en termes de gauche/droite est désuet. Mais nos priorités peuvent être en ligne avec des valeurs humaines comme le respect des choix, la liberté d'agir et de vivre. Radicalisme n'est pas religieux, étranger ou orienté sexuellement. Il est humain et en tant qu'individu, en tant que citoyens de nos pays respectifs, en tant que membre d'une communauté, il est impératif de faire comprendre à nos dirigeants que la possession de leur pouvoir passe par NOS intérêts et non des leurs. Et notre mode de vie, par l'affirmation de ces intérêts.

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